Amazon.com:LE CŒUR DE NOTRE-DAME MARIE DE NAZARETH:UNE HISTOIRE DIVINE |
HISTOIRE DE HENRI VIIIET DE SCHISME D’ANGLETERREPAR
M. AUDIN
PRÉFACE.
« C’est un spectacle où la
gravité se mêle au pathétique, la pompe à la tristesse, l’émotion à la
grandeur, que nous allons offrir à vos regards; vos larmes, en nous écoutant,
couleront plus d’une fois : si votre cœur s’ouvre à la pitié, pleurez. Imaginez,
par la pensée, que vous avez sous les yeux les personnages mêmes du drame,
comme s’ils vivaient encore. Voilà toute la cour de Henri, avec ses lords, ses
grands, ses courtisans, son peuple. Comme en un instant cette puissance est
atteinte et brisée ! Si vous aviez le courage de rire, je dirais qu’un homme
peut pleurer le jour de ses noces »
Ce prologue, dont le grand
poète dramatique de l’Angleterre a fait précéder sa tragédie de Henri VIII, est en quelque sorte le résumé de notre ouvrage. Du sang et des larmes, voilà
ce que Shakespeare voulait offrir à ses habitués, «au prix d’un schelling par
personne ». Du sang, des larmes, un despotisme inepte, des folies meurtrières,
et, ce qui ne s’est jamais rencontré dans les annales d’un peuple chrétien, une
nation abrutie par ses représentants, la loi elle-même consacrant l’iniquité,
des pairs faisant un dogme de la servitude, des
communes transformant le prince, non pas en image de Dieu, mais en dieu même,
un sacerdoce revêtant le théocrate des attributs de celui qui règne dans les
cieux, l’infaillibilité et l’impeccabilité : voilà ce que l’historien doit
montrer à ses lecteurs.
Nous n’avons jamais connu de
roman plus dramatique que les Annales de Tacite, et, malgré le
merveilleux talent de l’écrivain, on laisserait là le livre si le crime y
triomphait toujours, parce que l’âme, avide d’émotions, l’est encore plus de
justice. Si l’âme veut être remuée, elle veut aussi être consolée. Aussi voyez
comme dans ce magnifique tableau de la vie des Césars, le châtiment, bien que
boiteux, presse et poursuit le crime. A chaque apparition d’un tyran nous
pressentons la venue prochaine d’un juge et d’un vengeur : l’expiation est une
loi à laquelle aucun des grands coupables mis en scène par l’historien ne
saurait échapper, même dans cette vie. Le libérateur, tantôt se cache sous les
vêtements d’un centurion obscur, tantôt se glisse, comme un voleur, dans
l’appartement secret du palais impérial, tantôt s’embarque sur une rive
étrangère, tantôt se réfugie dans un cloaque, pour saisir et frapper
l’oppresseur : presque tous ces empereurs meurent de mort violente, l’un souâ
un oreiller, l’autre sous la pointe d’un poignard. De là toutes ces péripéties
funèbres où les tyrans, appréhendés par une main invisible, expient jusqu’aux
larmes qu’ils font répandre, même après dix-huit siècles, à celui qui lit le
récit de leurs forfaits. Que notre lecteur ne s’attende pas à celte
intervention immédiate de la Providence pour dénouer des faits matériels. Ce
sont ces phénomènes visibles qui forçaient l’écrivain païen à reconnaître
l’existence d’une cause suprême : pour l’admettre, le chrétien n’a pas besoin
de la contempler dans des signes qui tombent sous les sens : il sait que Dieu
est patient parce qu’il est éternel. Que Henri règne en paix, et qu’après une
vie d’opprobres il meure dans son lit, qu’importe à celui qui ne cherche pas à
sonder les mystérieuses voies du ciel? L’impunité du coupable ne saurait accuser
la Divinité.
Nous n’aurions pas entrepris
l’histoire de ce règne lamentable, si nous n’eussions eu pour but que de
réveiller des souvenirs qui, comme l’a dit ailleurs Shakespeare, seraient
capables de faire verser des pleurs aux anges mêmes. L’épisode du schisme de l’Angleterre
avec Rome, étudié dans ses causes et ses effets, est fécond en graves
enseignements que nous avons tâché d’indiquer, à mesure du développement des
faits historiques. Ici se reproduira la lutte des deux principes que nous avons
déjà signalée dans nos précédents travaux sur Luther et Calvin. En racontant
les progrès de la réformation allemande depuis le moment où le moine d’Erfurt
affiche son appel à la révolte sur les murs de l’église de Tous-les-Saints, à
Wittemberg, jusqu’à l’heure où il laisse tomber de ses doigts glacés son
pamphlet contre la papauté, nous avons pu voir que, hors de cette unité
représentée par le symbole catholique, il n’y a plus que désordre dans
l’intelligence, anarchie dans les doctrines, négations dans la pensée,
désespoir dans l’âme, stérilité dans l’œuvre. Au catéchisme de cette Église qui
civilisa le monde, qu’a pu opposer Luther avec tout son génie et toutes ses
colères? une confession qu’il fait et rapièce, qu’il rature et change, jusqu’à
son dernier souffle, et que ses disciples remanient et corrigent jusqu'à ce que
les signes muets qui la représentaient à l’œil ne traduisent plus l’image
native, brisant ainsi, sous le nom d’unité catholique, cette association de
toutes les âmes, seule source féconde d’œuvres immortelles. Le docteur des
nations a dit : Fides ex auditu, la foi par l’ouie; mais comment la foi
quand il y a autant de doctrines que de docteurs?
A Genève, ce fut sur les
ruines de toutes les libertés communales, achetées ou conquises par le peuple
et ses évêques, que Calvin parvint à fonder la réforme. Au pouvoir sagement
limité de l’épiscopat succéda bientôt une théocratie qui, pendant quinze ans
de lutte avec le parti libéral, ne vécut que par la terreur et le gibet. C’est
un écrivain de l’école de Berlin qui a dit, en parlant des lois de Calvin,
qu’elles étaient écrites avec un fer rouge, et M. James Fazy a fait justice des
institutions du Genevois , qui semblent dérobées à Dèce ou à Valens, et qui
punissent comme un blasphème toute médisance contre l’hiérophante. Genève
réformé ressemble un moment à la cité de Dante, où l’on n’entend résonner que
des soupirs, des gémissements et des pleurs sous un ciel sans étoiles.
Quand on étudie l’Angleterre
dans la période qui précéda l’avénement des Tudor, on est frappé de l’état des
institutions libres que possède le pays. On y trouve une grande charte arrachée
au roi Jean par les barons; à côté de ce code écrit, des exemples de
résistance au despotisme; une chambre des lords formée d’hommes d’ancienne race
jaloux de leur indépendance; une chambre des communes qui a pris une assez
large place dans l’administration des affaires, et défend avec un courage
persévérant les immunités du foyer domestique et les libertés individuelles;
une représentation religieuse sous le nom de convocation, qui peut, sans
l’autorisation ou le contrôle du prince, se former en synode et régler tout ce
qui appartient au dogme ou à la discipline. Le clergé, au besoin, invoque les franchises
qu’ont reconnues et confirmées les chartes royales. Le peuple a le droit de se
réunir, d’être armé, d’être jugé par ses pairs. La royauté, de quelque
puissance qu’elle soit armée, quand elle a dépensé ses revenus particuliers,
est obligée, pour vivre, d’en appeler au vote du pays. Il faut bien reconnaître
que c’est sous l’influence du catholicisme que toutes ces institutions et ces
libertés, objet d’envie des autres peuples, se sont fortifiées et développées.
On voit combien est injuste le reproche qu’on a fait au catholicisme de son
affinité avec le despotisme. En Angleterre, il s’est intimement associé à la
vie représentative de la nation. Peu soucieux des formes politiques d’un peuple,
que ces formes se nomment parlement, états généraux, diètes ou cortès, il pose
sa tente partout, même à côté des tribunes républicaines de Florence, de
Venise, de Gênes, de Pise, de Sienne; occupé partout de veiller sur les
libertés populaires, et bien différent du protestantisme qui, en Allemagne,
théâtre de sa première apparition, loin de demander la liberté politique,
accepte, dit M. Guizot, que nous aimons à citer, «je ne voudrais pas dire la
servitude politique, mais l’absence de la liberté.»
La révolution religieuse, en Angleterre, fut un
simple accident et non, comme l’a prétendu Burnet, une protestation réfléchie
d’un peuple opprimé contre la tyrannie de ses prêtres. En Angleterre pas plus
qu’en Allemagne, au seizième siècle, le sacerdoce n’opprima la société. L’histoire
nous montre ce sacerdoce ce qu’il fut réellement, « facile et tolérant », Au
besoin, la papauté était là pour lui donner des leçons de sagesse et de
modération. Nous assisterons bientôt à une lutte entre la royauté représentée
par Henri VIII, et la papauté manifestée par Léon X, Clément VII et Paul III,
et nous verrons lequel de ces deux pouvoirs défendit la justice et la
civilisation. Produit d’un caprice amoureux, le schisme anglican sortit tout
armé du cerveau d’un Tudor, sans qu’aucun fait extérieur eût annoncé ou
provoqué son avènement. Dans cette œuvre révolutionnaire, M. Guizot fait
intervenir à la fois le prince et l’épiscopat qui s’associent pour se partager,
soit comme richesses, soit comme puissance, les dépouilles de la hiérarchie
pontificale. Il nous semble que l’illustre publiciste donne un rôle trop
important à l’épiscopat, qui ne se présente ici que comme l’instrument passif,
l’esclave obéissant, le comparse soumis de la royauté. Il est bien vrai que
pour gagner le clergé, le despote consentit à lui abandonner une partie de
l’argent des monastères spoliés, mais il retint le pouvoir, pouvoir
monstrueux, d’hiérophante et de monarque. C’est le représentant de ce dualisme
phénoménal que nous nous sommes proposé de montrer dans les deux phases de sa
vie mondaine et spirituelle.
Cette histoire de Henri VIII et du schisme d’Angleterre
est en quelque sorte le complément de nos travaux antérieurs sur la réforme,
travaux sérieux, patients et consciencieux surtout, comme la critique
allemande l’a reconnu. C’est encore aux sources officielles que nous sommes
allé nous inspirer. A Rome, la Vaticane, outre les lettres autographes de Henri
à Anne de Boleyn, nous a donné de nombreux documents sur la lutte si glorieuse
de Clément VII avec le roi d’Angleterre, et les intrigues diplomatiques de
Wolsey; la Minerve, des pages inédites sur le sac de Rome, et les disputes des
universités italiennes touchant la question du divorce entre Henri et
Catherine d’Aragon.
A Florence, la Magliabecchiana nous a livré les dépêches des ambassadeurs vénitiens en Angleterre.
Vienne est riche en lettres de Charles-Quint, que nous avons soigneusement
consultées. A Paris, dans la collection Béthune, est déposée la correspondance
des agents français auprès du cabinet britannique, trésor de révélations qui
n’avait point été épuisé par les patientes explorations de Le Grand. Mais c’est
surtout au British Muséum de Londres que sont rassemblées les confidences authentiques
de tous les hommes politiques, Wolsey, Thomas More, Cromwell, Cranmer, Pace,
qui prirent une si grande part aux luttes politiques et religieuses de cette
époque. C’est là qu’est la correspondance du connétable de Bourbon, vendant à
Henri VIII la couronne de François I. Voilà les sources où nous avons puisé, où
l’on a puisé pour nous.
Loin de nous la pensée d’imposer au lecteur nos
opinions personnelles. Avantd’écrire notre ouvrage, nous nous sommes rappelé
que Goethe exige que l’historien s’assure d’abord, et qu’il prouve ensuite que
les faits qu’il rapporte appartiennent bien au domaine de la réalité. Grâce à
nos documents officiels, où l’autographe, ce miroir de la conscience, vient
souvent éclairer le passé d’une lumière nouvelle, on pourra facilement
confirmer ou réformer, quand surtout on aura comparé nos récits inédits avec
le témoignage des historiens, des biographes, des publicistes, des philologues
que nous avons consultés, et dont nous allons donner la liste.
NICE READINGRichard III, King of England, 1452-1485HENRY VIIENGLAND UNDER THE TUDORS KING HENRY VII (1485-1509). by DR. WILHELM BUSCHLIFE OF THOMAS LINACRE, 1460-1524LIFE OF THOMAS MORE , 1478-1535REGINALD POLE, CARDINAL ARCHBISHOP OF CANTERBURY1500-1558PERKIN WARBECK, 1474-1499
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